L’intervention de l’adjoint de Sassenage à la Métro sur le projet de Métro-câble

2 janvier 2023

Nous avons pu retranscrire le discours de notre élu Jérôme MERLE, 1er adjoint délégué à la Métro, lors du dernier conseil de la Métropole de Grenoble sur le projet du métro câble. Nous pensons que cela peut vous aider à mieux cerner les enjeux désastreux que pourrait avoir ce projet sur la ville de Sassenage.

« Monsieur le président, chers collègues,

Nous sommes amenés à nous prononcer aujourd’hui sur l’impact environnemental d’un éventuel Métrocâble entre Fontaine et Saint-Martin-le-Vinoux, dont le tracé, accessoirement, passe pour moitié, soit environ 1,6 km, sur des zones d’habitations et également agricoles de Sassenage. Nous avons donc un certain nombre de choses à dire sur le sujet !

D’un point de vue environnemental, il y a différents impacts et nuisances liés au projet et tous les documents ad hoc, graphiques, insertions paysagères, etc… qui s’y rapportent sont annexés à l’étude.

  1. Un projet qui nuirait gravement à l’environnement

1 Les nuisances visuelles

Le projet s’implanterait dans un cadre paysager de qualité et l’étude d’impact précise que, je cite, les vues depuis ce site sont dégagées sur les massifs imposants du Vercors et de la Chartreuse, lui conférant ainsi une qualité paysagère indéniable . A ce titre, le projet devrait s’envisager dans un espace en transition où devront être préservées les ouvertures vers le grand paysage tout en gommant les effets de contraste pénalisant fortement la zone. Or, tel n’est pas le cas en l’espèce.

Sur le territoire de Sassenage, il serait situé, pour partie, dans une zone non urbanisée à vocation agricole (station de la Saulée et pylônes), et à proximité immédiate de tissus pavillonnaires (lotissements et maisons individuelles).

L’implantation retenue aurait pour conséquence la perception d’infrastructures aux gabarits impressionnants avec des hauteurs supérieures à 15 m et de fortes emprises au sol. Les covisibilités porteraient une atteinte significative au caractère et à l’intérêt des lieux. La station de la Saulée contribuerait à obstruer visuellement l’anticlinal de la falaise de Sassenage, phénomène géologique exceptionnel reconnu mondialement, comme le souligne l’insertion paysagère.

En conséquence, le projet de liaison serait de nature à entrainer une atteinte significative au paysage naturel avoisinant de la Métropole et à son environnement immédiat en créant une gêne visuelle importante, telle que peuvent en témoigner les différentes insertions paysagères jointes au dossier.

2 Les impacts sur les espaces agricoles :

La station de la Saulée serait installée au sein d’une parcelle agricole, à  moins de 100 m d’un lotissement, et le passage du câble au-dessus de la plaine agricole entraînerait de ce fait des servitudes. Les accès devraient être modifiés sans parler des nécessaires expropriations.

Ce projet serait donc de nature à porter atteinte à la préservation et à l’exploitation des terrains agricoles reconnus pour leur valeur agronomique. Il serait alors en totale contradiction avec les enjeux climatiques d’aujourd’hui en  provoquant une artificialisation importante de ces sols.

3° Les atteintes aux espèces protégées :

Sur le territoire de Sassenage, sont notamment identifiés quatre espèces protégées potentiellement nicheuses qui se nourrissent et surtout se reproduisent dans la zone d’étude, étude qui conclut que malgré toutes les mesures prises dans la conception du projet et l’anticipation de la phase de chantier, il reste impossible d’exclure tout risque d’impact de destruction d’habitat d’espèces ou d’individus d’espèces protégées. 

Le résumé non-technique de l’étude d’impact indique d‘ailleurs clairement un risque de destruction/altération/dégradation d’habitats de ces espèces.

D’ailleurs, à ce titre, le SMMAG entend solliciter une dérogation « espèces protégées » au titre du code de l’environnement, du fait que la mise en œuvre du projet serait de nature à porter une atteinte directe à plusieurs espèces animales protégées ainsi qu’à leurs habitats.

C’est donc bien la preuve, à la lumière des éléments portés au dossier, que le projet porterait clairement atteinte aux espèces protégées, notamment à celles présentes sur le territoire sassenageois.

4 Les nuisances sonores :

Le projet générerait de nouvelles nuisances sonores liées à la motorisation et au passage des cabines. Etrangement, l’étude acoustique, selon les modélisations réalisées, conclut que le projet respecterait les objectifs de contributions sonores réglementaires.

Or, il n’existe aucune réglementation spécifique acoustique relative aux transports par câble. Les niveaux sonores prévisionnels induits par le projet ont été comparés aux seuils de la réglementation relative au bruit routier.

Ces résultats sont donc basés sur une réglementation non spécifique au transport par câble.

Par ailleurs, ces modélisations donnent des valeurs moyennes, et l’impact sonore des infrastructures du câble pourrait être bien supérieur à celles-ci, et notamment pour les riverains immédiats du projet (lotissements la Saulée, la Cerisaie, riverains de la rue de l’Argentière, et de la zone d’activités) déjà très impactés par les infrastructures routières avoisinantes.

De plus, l’étude ne prend pas en compte la présence des falaises qui contribueraient, par effet de réverbération, à amplifier l’ambiance sonore.

En conclusion, l’étude acoustique n’intègre pas tous les éléments de contexte permettant de conclure que le transport par câble n’apporterait pas de nuisances sonores supplémentaires aux riverains.

  • Un projet qui ne résoudrait rien et comporterait des risques

1) En termes de déplacements :

Le projet de transport par câble reste intimement lié à l’aménagement de la ZAC des Portes du Vercors et les stations sont positionnées en vue de permettre un accès privilégié pour ses futurs habitants, tels qu’en témoignent plusieurs dossiers.

Or l’opération sur Sassenage est remise en cause depuis l’évolution des connaissances en matière de risque inondation par le Drac qui rendent aujourd’hui ces terres agricoles inconstructibles. En l’espèce, il existe un lien fonctionnel et économique évident entre les deux projets, qui pose question sur la pertinence du Métrocâble, compte tenu de son coût prévisionnel exorbitant estimé, pour l’instant, à 65 millions d’euros (non stabilisé) et des incertitudes pesant sur l’opération des Portes du Vercors elle-même.

Par ailleurs, le Métrocâble n’apporterait aucune solution aux enjeux de déplacement et de saturation sur la Commune et aucun gain de temps. En fait, il s’agit là uniquement d’une desserte  locale.

De plus, aucun stationnement aux abords des pôles d’échanges voyageurs n’est prévu, ce qui contribuerait à générer de nouveaux déplacements motorisés, notamment pour les habitants de Sassenage désireux d’emprunter ce transport.

Pour ces motifs, par délibération du Conseil Municipal en date du 8 juin 2021, la Ville de Sassenage a marqué son opposition au tracé actuel, et a proposé a minima un tracé positionné exclusivement sur la Commune de Fontaine.

Nouvelle liaison, elle aurait permis de réduire la durée du trajet par la réduction de la distance, de constituer une offre de stationnement, de préserver les terres agricoles, de réduire les impacts sur l’environnement. Toutefois, le SMMAG n’a pas souhaité donner suite.

En synthèse, ce projet de liaison ne présente aucun intérêt pour la réduction du flux de véhicules.

2) Le risque inondation :

Les modélisations réalisées démontrent que les impacts hydrauliques seraient plus importants en rive Gauche, et notamment les stations de l’Argentière, située en aléa fort, et de la Saulée en aléas fort et très fort, zones inconstructibles eu égard au risque inondation lié au Drac. Le projet nécessiterait notamment une forte imperméabilisation des sols et contribuerait à aggraver le risque inondation, la vulnérabilité des personnes (tiers, usagers du Métrocâble) et des biens. L’étude d’impact souligne à cet égard une mise en danger du personnel d’exploitation, et des usagers, et des dégradations des équipements en cas d’inondation 

Or, les éléments du dossier n’éliminent aucunement les risques actuels pour les tiers voire évoquent la possibilité d’en provoquer de nouveaux.

D’autre part, l’enquête publique sur le projet de PPRI Drac s’est terminée le 25 novembre et ses conclusions seront connues, vraisemblablement, au cours du premier trimestre 2023.

D’ailleurs, pour information, suite à ce qui précède, la Commune de Sassenage, considérant le risque inondation suffisamment sérieux et caractérisé, a refusé une demande de certificat d’urbanisme opérationnel déposée par le SMMAG concernant la station de l’Argentière.

3) Le risque de pollution :

La commune s’interroge sur les risques de pollution liés au projet. En effet la nappe phréatique à  l’endroit du projet sur Sassenage est affleurante.

Comme le précise l’étude, les décaissements nécessaires à l’installation des ouvrages seraient de l’ordre d’1,80 m de profondeur. A cela s’ajouterait la réalisation de pieux pour la confection de fondations spéciales. Il y aurait donc un risque potentiel de pollution des eaux souterraines par la pénétration des différentes couches et la mise en communication des eaux entre elles. Le risque serait d’autant plus élevé que les décaissements et les forages se situent à proximité de parcelles anciennement occupées par TECSAS, entreprise ayant utilisé pendant longtemps des métaux lourds et des produits fortement acides.

Pour conclure, Messieurs les présidents, de la métropole et du SMMAG,

Avec le Métrocâble, nous croyons que, pour une fois, vous avez réussi à créer le plus large consensus sur un projet majeur.

En effet, pour une fois, tout le monde est d’accord … pour être contre !

Les collectifs hostiles au projet se multiplient, la commune de Grenoble est contre et le dit dans la presse, tout comme le Conseil Départemental de l’Isère, d’autres communes émettent de fortes réserves, la commune de Sassenage s’y oppose et la Région pourrait prendre le même chemin.

Donc, je pose solennellement la question : Jusqu’à quel point une institution démocratique peut-elle porter un projet aussi impactant contre autant d’oppositions d’acteurs élus ou pas, mais légitimes ?

Nous croyons sincèrement qu’il faut revenir à la raison et mettre un terme à ce projet.

Et ce n’est pas une opposition de principe ou de posture que nous exprimons, vous le savez bien. Sur d’autres sujets, vous avez trouvé notre soutien lorsque l’intérêt général était pris en compte. 

Nous ne sommes pas des adversaires du mode de transport par téléphérique en tant que tel, il peut représenter une bonne solution dans certains cas et surtout dans les déplacements valléens.

Nous ne sommes évidemment pas hostiles à Poma, une entreprise qui fait notre fierté à travers le monde.

Mais nous sommes des élus municipaux et métropolitains, auxquels des citoyens ont confié la tâche de les protéger, de les défendre et de faire une bonne utilisation des moyens et des deniers publics.

C’est à dire tout l’inverse de ce que vous faites actuellement..

Eh oui, plaçons-nous du point de vue de l’amélioration des mobilités :

1) Ce projet ne correspond à aucun des principaux flux, aucun des principaux points noirs qui polluent la vie des métropolitains. Si ce projet voyait le jour, ce serait la même chose pour les milliers d’automobilistes qui perdent un temps fou dans leurs voitures.

Et pour ces mêmes automobilistes, qui ne peuvent pas utiliser les modes doux étant données les distances qu’ils franchissent quotidiennement, nous avons la chance d’être retenus dans un dispositif national pour le développement d’un RER métropolitain, que Sylvain Laval et vous-même, Monsieur le président, avez accueilli très positivement dans la presse, allant même jusqu’à proposer de signer une pétition pour sa réalisation. Et c’est, évidemment, dans cette direction là qu’il faut concentrer dorénavant les moyens.

2) Il est question de desservir des quartiers qui n’existent pas encore et des habitants qui ne sont pas encore là. Alors oui, réservons des emprises pour l’avenir, mais commençons par nous occuper des habitants d’aujourd’hui avant ceux de demain, en maximisant le report modal, avant que les voitures ne rentrent dans le cœur de la métropole !

Juste un rappel, chers collègues, le SMMAG avait proposé à la ville de Sassenage de choisir entre deux solutions de tracé.

L’un qui passe entièrement par Fontaine, l’autre qui passe par Sassenage pour un tiers du trajet et avec deux stations sur cette même commune.

Sauf que, les stations sur Sassenage sont tellement en décalage avec l’urbanisme local, et le tracé provoque de telles nuisances, qu’une courte concertation avec les riverains, et les élus de Fontaine, plébiscite le choix d’un passage uniquement sur Fontaine.

Et, surprise, la proposition d’un tracé uniquement sur Fontaine est abandonnée par le SMMAG qui l’avait lui même proposé un mois plus tôt…justifiant cette position par la nécessité de refaire un marché public, ce qui ferait perdre du temps….Pardon, mais on parle de presque 100 M€ d’argent public in fine !! Donc, on aurait dû, justement, prendre notre temps, en 2020, avant de conclure des marchés dans la plus grande précipitation, avant les élections !

Alors, faudrait-il donc balayer l’avis des citoyens, des élus devant les démarches administratives ?

Faudrait-il donc soutenir un projet de transport public, non pas parce qu’il est le plus efficient, non pas parce qu’il est le mieux accepté, mais parce qu’en choisir un autre obligerait à modifier un marché public …

Voulons nous raboter, encore, la légitimé des Maires ou respecter les positions de ceux qui ont été directement choisis par les électeurs ?

Nous pensons que l’on ne doit pas choisir un tracé de transport public pour qu’il réponde avant tout à l’ambition politique d’être terminé avant la fin du mandat, 

Nous pensons que la légitimité des élus et l’avis des citoyens doit primer.

En conséquence, nous voterons contre cette délibération ».